Autrefois il y avait ici un poème
Qui parlait d’une personne vivante
Mais j’ai changé d’avis sur cette personne
Et j’ai effacé toutes les traces du poème
Comme un tyran
Fait fusiller un ministre en disgrâce
dimanche 22 décembre 2013
dimanche 15 décembre 2013
Yu Jian - 23
Le poète manie les mots
Comme un boucher des chapons qu’il vient d’égorger
Et qu’il emporte dans la cuisine
Comme un militant au soir de la révolution
Qui colle des slogans
Au premier étage du comité central
Caresse les dents de l’ambassadeur
Il voudrait pour son émotion en pousses de soja
Trouver la bonne échoppe
Comme un boucher des chapons qu’il vient d’égorger
Et qu’il emporte dans la cuisine
Comme un militant au soir de la révolution
Qui colle des slogans
Au premier étage du comité central
Le poète
Hors des murs du ministère du commerce extérieurCaresse les dents de l’ambassadeur
Il voudrait pour son émotion en pousses de soja
Trouver la bonne échoppe
samedi 14 décembre 2013
Yu Jian - 17
Il est un bonheur que je n’ai jamais éprouvé
Un bonheur qu’Hitler n’a jamais éprouvé
Il ne pouvait que donner des ordres à des généraux
Je ne puis qu’écrire avec obstination
Mais aucun de nous n’a ressenti
La joie de la machine à laver
Dont le tambour inoxydable
Trouve les culottes de la jeune fille
Dissimule sa crasse
Trouve que les robes de bal et les queues de pie
Mériteraient d’être lavées
Ce point de vue est défendu
Par l’humanité toute entière
Aussi
Pour un monde irréprochable
Les habits de toutes les couleurs
Tous
De la machine à laver
Une bataille de Stalingrad ne fera
Que la machine à laver
Qui ne distingue pas un uniforme d’un mouchoir
S’arrête
Un bonheur qu’Hitler n’a jamais éprouvé
Il ne pouvait que donner des ordres à des généraux
Je ne puis qu’écrire avec obstination
Mais aucun de nous n’a ressenti
La joie de la machine à laver
Dont le tambour inoxydable
Trouve
tous les vêtements
SalesTrouve les culottes de la jeune fille
Tachées
Trouve les mouchoirs du bébé
Infects
Trouve que la cotte de l’ouvrierDissimule sa crasse
Trouve que les robes de bal et les queues de pie
Mériteraient d’être lavées
Ce point de vue est défendu
Par l’humanité toute entière
Aussi
Pour un monde irréprochable
Les habits de toutes les couleurs
Et de
toutes les coupes
La soie d’orient le lin d’occidentTous
Sont
jetés
Dans le tambour obscurDe la machine à laver
Qui jour et nuit
Dans tous les foyers du monde
Tourne
Les fleuves peuvent s’assécher
Les
gouvernements tomber
Jamais Une bataille de Stalingrad ne fera
Que la machine à laver
Qui ne distingue pas un uniforme d’un mouchoir
S’arrête
vendredi 13 décembre 2013
Yu Jian - 14
Tu vas
Aboutir
Devenir une rose blancheMême si tu as dans l’obscurité
Connu le désespoir
Et
appris à hurler
Même si tu as bouchéAvec de l’encre et du chanvre
Tous les canaux
Toutes
les veines
Qui mènent en AvrilMême si tu as vicieusement
Maudit
L’air
Le
soleil et l’eau
Même si toute ton âmeEst opposée
A l’esquisse d’une rose
Même si tu as
Avant l’aube
Tenté de te tuer
Tu es destiné à aboutir
Destiné à devenir une roseAh
La
lumière est irrésistible
En Avril elle entrera exacte et régulièreDans ton obscurité depuis longtemps brisée
Ah
Rose
blanche
Tu seras commeUne rose
Ouverte
Aboutie
A l’heure dite payant son tribut aux abeilles
A l’heure dite donnant des images au poète
A l’heure dite se fanant
jeudi 12 décembre 2013
Yu Jian 8
Une paire de chaussures souples
A fait le bonheur de mes piedsAutrefois j’en voulais aux routes
Toutes creux et bosses
Jamais
aplanies
Une vraie route devrait être égaleConvenir à tous les souliers
Sans qu’ils aient à s’y adapter
Mais aujourd’hui j’ai de nouvelles chaussures
Et leur pas joyeux
M’a fait changer d’avis
La route avait raison
Mes souliers avaient tort
Yu Jian - 7
L’eau dans ce verre
Pour
qui est-elle Ce ne peut être l’eau du lion
Ni celle de l’hippopotame
Dans cette eau il n’y a rien qui se mange
Et pourtant le buveur s’en nourrit
Il finit son verre
S’en remplit un autre
Puis se remet à écrire
Et raconte
Que sur la berge d’un fleuveCet hippopotame
A vu
le reflet du lion
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